lundi 18 août 2008

La révélation (3)

Nous restons enlacés, sans un mot. Mille pensées assaillent mon esprit. Je dois bien le constater. Je l’aime encore. Et la menace de cette opération… Ce corps si épanoui, si frais et alerte… Mutilé. Marqué à vie. Et si elle a des rayons… Une chimiothérapie… Pourra-t-elle encore avoir des enfants ? Et même, si les traitements sont longs. Ne sera-t-il pas trop tard, après ? Et Nicolas. Comment va-t-il réagir, lui ? Il est si jeune. Il a la vie devant lui. Supportera-t-il le quotidien avec une malade ?
Je caresse mécaniquement ses cheveux. Je m’imprègne de son odeur. Comme si la maladie risquait ensuite de la modifier…
Suzy, je t’aime. C’est effroyable. Etouffant. Glaçant. Je l’aime. Je l’aime toujours, et pourtant je pense là, à cet instant, à Dominique. Et pas comme à une contrainte. Non. Je l’aime. Je le voudrais auprès de moi, là, en cet instant. Sentir son corps jeune, frais et vigoureux me transfuser de la vie. J’aimerais me donner à lui, en cet instant. C’est dingue. Je tiens mon ex femme dans mes bras et mon cœur bat violemment pour elle. Et je rêve que mon amant m’assaille, me pénètre, m’arrache la douleur en même temps que le plaisir… Je suis un pervers.


Un frisson traverse l’ensemble du corps de Suzy. Elle se serre plus fort encore dans mes bras. Je n’ose pas bouger. Quand elle parle, c’est un murmure. Une confidence.

- Tu sais, Al, je n’ai pas vraiment peur de la mort. Nous l’avons toujours regardé en face. Je me sens prête à l’affronter. C’est drôle. Elle n’est pas vraiment une menace…
- … … (Je caresse tendrement ses cheveux.)
- Non, je n’ai pas peur de la mort… Pas du tout…
- … … (J’embrasse son front, y laisse reposer mes lèvres.)
- Non. C’est souffrir qui me fait peur… J’ai peur de ne pas être capable de faire face…
- Mais nous n’en sommes heureusement pas là du tout ! Cette putain de maladie, tu la vaincras ! Nous la vaincrons ! Tu ne seras pas seule. Nico, moi, les enfants… Domi aussi… Nous serons tous autour de toi…
- Je serai seule face à la souffrance, Al. Quoi que tu dises.
- Chérie, tu sais les extraordinaires progrès de la médecine… La douleur est prise en charge très sérieusement maintenant. Personne ne te laissera souffrir l’insoutenable… Nous sommes au XXIème siècle !
- Pendant la maladie… Oui, peut-être… Sans doute… Mais si les choses prennent une mauvaise tournure… Ils ne maîtrisent plus rien, alors…
- Chérie… Regarde-moi. Quoi qu’il arrive, tu entends, quoi qu’il arrive, je ne te laisserai jamais souffrir. Je serai là. Je te le jure ! Chérie…

Je la serre à l’étouffer. Je prends son visage à deux mains, embrasse son front, ses yeux, son nez… Mes lèvres courent sur son visage, vont à la rencontre de son cou, des fossettes des clavicules… Sa respiration est chaotique, saccadée. Elle geint.

- Al, non. Al… Nicolas, Domi… Tu es fou ! Non, Al…
- Je t’aime, Suzy, je t’aime toujours… Oui, je sais, j’aime aussi Dominique. Mais je t’aime, toi ! Tu es ma femme… Ma femme à moi…
- Al, non ! Nous allons tout de suite le regretter… C’est de la folie… Al…
- Non, je ne suis pas fou. Nous ne sommes pas fous… Je t’aime Suzy. Tu as besoin de moi. J’ai envie de toi. Une dernière fois… Chérie…

Nous sommes allongés maintenant. Mes mains parcourent son corps comme celles d’un aveugle qui cherche désespérément à reconnaître un corps qu’il a autrefois bien connu. Ma bouche dévore son cou, je mordille son menton, mes lèvres retrouvent enfin les siennes… Elle me repousse désespérément…

- Al… La porte…

Je me relève pour fermer la porte de la chambre restée entrouverte. Les enfants. Surtout que les enfants ne se rendent pas compte. Je rejoins Suzy et l’embrasse tendrement avant d’entreprendre de la déshabiller. Gestes connus. Rituel à la fois tendre et passionné. Après plus de treize ans de vie commune, nous étions ainsi chaque fois, émus, vaguement pressés, vaguement maladroits, toujours fébriles. Elle me laisse faire, mais, mine de rien, elle m’aide et me simplifie la tâche… Comme autrefois…
Enfin nue, elle s’étire et ce cambre sur le lit, pendant que je me déshabille en laissant mes lèvres découvrir, redécouvrir chaque fossette, chaque mont, chaque rondeur de ce corps magnifique qui semble ne vouloir jamais vieillir… Quand ma bouche a rejoint ses hanches et que mes dents mordillent ses flancs, elle emprisonne ma tête de ses deux mains, plaque mon visage sur son corps, à m’empêcher de respirer… Je viens de retrouver un de nos points sensibles… Enfin débarrassé de mes rares oripeaux estivaux, je viens la recouvrir de ma lourde carcasse en cherchant ses lèvres…
Au début de notre amour, j’appréhendais de la couvrir ainsi, elle si fragile, si fluette, avec ce corps massif et lourdement athlétique… Plus habitué aux confrontations viriles et musclées avec mes compagnons, j’avais tout bêtement peur de lui faire du mal… Je m’usais les coudes à essayer d’alléger cette masse étouffante. Et c’est elle qui me demanda de la couvrir sans ménagement… « Je veux te sentir, je veux que tu m’étouffes, je veux être totalement à toi… »
Je glisse quand même sur le côté pour laisser le champ libre à ma main droite qui ne parvient pas à se repaître de cette douceur de soie retrouvée. Mes mains éprouvent le poids de ses seins fermes et bien galbés, le sein droit… Petit flottement… Je baise tendrement cet obus sensuel qui contient, là, sous cette peau diaphane… Non, l’idée est horrible. Je remonte lui voler un baiser qu’elle rend aussitôt tendre et passionné…
Ma main est redescendue flatter le mont et mes doigts jouent avec ses lèvres et s’insinuent dans son intimité. Elle geint de nouveau, bouge un peu pour dégager son propre bras droit et lui permettre de prendre à pleine main mon vit qui n’en peut mais… Tandis qu’elle martyrise délicieusement mon braquemart à son comble, je la sens devenir abondamment humide. Nous avions trop d’envies ce soir, tout va bien vite… Je me prépare à la posséder, mais elle me repousse fermement et entreprend de calmer le jeu… en me plaçant sur le dos et en remplaçant la branlette musclée par de savantes gâteries… Pour me montrer qu’elle n’a rien oublié… Au début de notre union, elle avait voulu comprendre ce que je trouvais de plus aux garçons… « Ils font l’amour mieux que moi ? » J’avais nié, bien sûr, en affirmant que c’était autre chose, de très différent, et puis j’avais avoué que je n’avais jamais trouvé de femme qui suce aussi bien qu’un homme… « Je veux que tu m’apprennes… » Merveilleux souvenirs de séances pédagogiques fort ludiques…

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